MA CLIQUE CLAQUE

vendredi 25 novembre 2016

Quelle année, ma rivière


Ça ne se passait jamais mal quand on allait marcher, le soir, au bord de la rivière.

Le chien courait vers l'eau et revenait plein de vase. On s'asseyait toujours sur le même banc et on lui expliquait qu'il ne faut pas sauter sur les gens. Je revois son air concentré quand on lui apprenait un nouvel ordre. Je n'ai plus que trois photos, près du moulin de l'étang, dans le parc du restaurant. Elle tenait encore dans mes bras. Le chien me manque, mais je ne suis plus vraiment triste. J'aurais voulu lui dire au revoir, mais il y avait plus important.

J'aime que la rivière me paraisse toujours moins belle quand je la montre à quelqu'un pour la première fois, comme si elle se moquait de moi. Cette année, j'ai traversé la rivière, je suis un peu plus proche de la mer. Je n'ai que de bons souvenirs au bord de la rivière.

mercredi 16 novembre 2016

Au revoir la maison, c'était bien et horrible la vie avec toi

   Je pensais que ce qui me faisait reporter sans arrêt le moment de déménager, c'était d'avoir à trier tout ce qui me rappellerait des souvenirs bons ou mauvais, c'est-à-dire: tout dans cette maison. J'ai arrêté d'aller dans la chambre, j'y ai poussé un à un les objets qui me rendaient triste, puis j'ai arrêté d'aller dans le bureau, d'aller à l'étage, d'ouvrir l'abri de jardin. Les murs se resserraient autour de moi comme ceux de la maison de Colin quand Chloé est malade, et je me répétais: Je suis bien là, dans mon canapé, je n'ai pas besoin de déménager moi.

   Le 1er octobre, je me suis réveillée en pensant "Allez, on s'en va." Je l'ai dit tout haut, et je me suis tout de suite rappelé que c'est exactement ce que j'avais chuchoté plusieurs fois à la suite presque un an plus tôt, quand j'avais commencé à mettre mes affaires dans un sac à dos en faisant le moins de bruit possible.

   Oui, j'ai passé une éternité à tout vider, en alternant pendant des semaines cinq minutes à trier et trente minutes à pleurnicher, je me suis encore mise dans un sale état en refusant que l'on m'aide, j'ai jeté, déchiqueté, piétiné trop de choses que j'aurais pu donner, mais je ne voulais plus qu'elles existent. 

   Mais en réalité, le plus bouleversant, c'est de réaliser que dimanche, quand j'aurai rendu les clés, il n'y aura plus aucun témoin de ce qui s'est passé. Cette maison était la seule chose sur terre à savoir tout ce qui est arrivé, et maintenant elle s'efface.